11 novembre 2007

Exposition : Steichen, une épopée photographique

S'il fallait un exemple de ce que la photographie peut revêtir en elle-même d'artistique, Steichen remplirait aisément ce rôle. Fort heureusement, aujourd'hui, il n'est plus besoin de se plier aux argumentaires d'hier et aux visions passéistes de l'expression artistique, et bien naturellement, la photographie s'est dotée de thuriféraires sourcilleux. Il n'empêche, l'exposition que consacre le Musée du Jeu de Paume au photographe d'origine luxembourgeoise rappelle, en quelques 400 photographies, au béotien, la force de cet art.

D'emblée, à peine les pieds mis dans l'enfilade de salles qui s'étalent sur deux étages et qui rendent hommage à ce fin stakhanoviste de la photographie, on est saisi par la délicatesse du cliché. Brumeux, doucement vaporeux, une quasi évanescence romantique. Voilà ce qui émane de l'art Steichen. De ce photographe décédé alors qu'il avait presque cent ans, de cet européen pendant les 18 premiers mois de sa vie, puis émigré dans le Wisconsin avec ses parents, pour y être naturalisé américain, c'est certainement ce qui revient à l'esprit.

Des clichés du Balzac de Rodin, exceptionnels par leur mystérieuse atmosphère embrumée, au sombre Flatiron Building, et en passant par le Brooklyn Bridge, objet lui même d'un célèbre argentique, l'art de Steichen s'épanouit au gré des photographies présentées au visiteur. Retouchés, transformés, travaillés comme par un orfèvre, le rendu de ces clichés est magique. A tel point que l'on aurait aimé pouvoir se livrer à une rapide comparaison avec l'original. Et certainement, l'exposition y aurait gagné en qualité à nous mettre plus au fait des techniques usitées. Quoi qu'il en soit, c'est sans doute d'ailleurs cette partie du parcours qui se révèle la plus instructive, tant elle étonne par son résultat.

Mais il nous est également rappelé que Steichen fut un solide portraitiste, traduisant avec une vibrante réalité la nature de ces sujets. Défilent ainsi Pierpont Morgan, Churchill ou encore Brancusi, l'un de ses amis.

Passionné d'horticulture, ce qui vaut d'ailleurs à l'exposition quelques clichés, Steichen fut également photographe de l'armée durant la première guerre mondiale. Mais il retourna rapidement à ses premiers émois et travailla pour de célèbres magazines à l'instar de Vogue et de Vanity Fair. Seront ainsi magnifiquement immortalisés nombre d'acteurs et de célébrités, tel Fred Astaire et Greta Garbo. Et bien sûr, comment, comment ne pas se souvenir de cette exceptionnelle série de clichés représentant Isadora Duncan sur les hauteur de l'Acropole?

C'est donc tout cela Steichen, cet inventaire à la Prévert qui, imparfaitement, rend compte de son oeuvre. Mais c'est aussi bien d'autres choses. Directeur de la photographie au MoMA de New York, organisateur de cette si célèbre exposition, "The family of Man". Et c'est aussi cela. Ces quelques lignes n'y suffisent donc pas. L'exposion du Jeu de Paume s'y attèle avec réussite, au terme d'un parcours particulièrement bien ficelé. Photographe d'un siècle, photographe du siècle, Steichen était un artiste. Une si belle rétrospective lui était due.

Exposition "Steichen, une épopée photographique"
Du 9 octobre au 30 décembre 2007
Musée du Jeu de Paume, 1 place de la Concorde, 75008 PARIS
Mardi 12 h - 21h ; Mercredi à Vendredi 12h - 19h ; Samedi et Dimanche 10h - 19h

1 commentaire:

Elisabeth Sécher-Loubet a dit…

Très belle exposition en effet.
Un seul reproche : le manque d'explications et la présentation froide des photographies. C'est dommage.
On en ressort néanmoins les yeux pétillants et la tête ailleurs.