23 novembre 2007

Le marin de Gibraltar


Les romans de Marguerite Duras ont toujours quelque chose d'indéfinissable. Et, à cet égard, le marin de Gibraltar, publié en 1952, ne faillit pas à la règle. Toujours cette attente , encore cette torpeur, cette presque moiteur qui devient si caractéristique de la prose de l'auteur.


Il faut dire que s'agissant du marin de Gibraltar, tout commence par un temps de canicule. Une canicule extrême, indescriptible qui s'empare de l'Italie. L'Italie où, précisément, le héros et son amie de l'époque, Jacqueline, décide de passer leurs vacances. Lui, après une enfance passée outre-mer, il est devenu fonctionnaire au Ministère des Colonies, s'attelant à un travail fort peu stimulant, celui de recopier des actes d'état-civil. Quant à elle, elle fait sensiblement la même chose. C'est d'ailleurs là qu'ils se sont rencontrés. Et Florence, après Gênes et Milan, sera le déclencheur, cet instant T, où il prend conscience de l'inanité de sa vie et de sa volonté d'en découdre. Attiré par le récit d'un ouvrier qui leur sert pour un temps de chauffeur, il cherche à tout prix, sans vraiment savoir pourquoi, à atteindre Rocca, petite bourgade côtière. Puis, il s'agit d'y quitter Jacqueline, qu'il n'a jamais vraiment aimé. Et là, il plaque tout, décide de ne pas rentrer en France. Intrigué par cette riche américaine dont le yacht mouille au port de Rocca, il parvient à en faire la connaissance. Et il s'embarque avec elle.


C'est qu'Anna a aussi une histoire. Veuve d'un riche propriétaire, elle parcourt les mers, de ports en ports, à la recherche d'un marin qu'elle croit de Gibraltar, et dont elle tomba éperdument amoureuse. Il est l'archétype du mauvais garçon, l'auteur d'un méfait qui pourtant la fascine. Atterri sur le yacht quelques années auparavant par le biais du hasard, il le quitte quelques temps plus tard à Shanghai, à la faveur d'une partie de cartes. Par la suite, ce ne fut que brèves recontres, épisodiques, pour toujours se terminer par un départ. Départ qui entraîna cette inlassable quête que mène Anne, et à laquelle cet homme, celui du début, bient se joindre. Cette quête sans fin, à laquelle elle ne croît plus vraiment, mais dont elle semble cependant avoir un besoin viscéral.


Du français Anna en est tombée amoureuse, et il en va de même pour ce dernier. Bien que le marin de Gibraltar ne quitte que rarement leur esprit, comme si sa présence intangible avait quelque chose de structurant dans cette étrange relation. N'est ce là qu'un remplaçant, l'instrument d'une attente plus douce? Peut-être. Mais, au fil du temps, il devient autre chose. Progressivement, l'on sent qu'il prend lui aussi sa place, assez prédominante.


Marguerite Duras restitue tout cela avec la finesse qui lui était sienne, avec cette dextérité du français rarement égalée. La langue traduit à merveille tant cette atmosphère bonhomme qui plane sur le yacht que l'étrange pesanteur, assez habituelle chez l'auteur, qui semble imprégner les personnages. Et si le marin de Gibraltar n'est pas le roman que l'on aura préféré chez ce personnage inclassable de la littérature française, ce n'est vraiment là qu'une affaire de goût. Rien de plus.


Marguerite DURAS, Le marin de Gibraltar, Gallimard, coll. "Folio", 2006 (1ère éd. 1952), 429 pages, 7,40 €

18 novembre 2007

La possibilité d'une île

Deux ans après sa sortie médiatisée et un Goncourt manqué, une relecture de ce chef d’œuvre procure toujours autant de plaisir et force l’admiration devant la puissance évocatrice des mots violents et crus qui décrivent un monde vu comme hostile, situé à seulement quelques années de nous, dans un futur proche.
Daniel est un artiste à la notoriété grandissante qui vit de ses one man show, principalement, de ses apparitions télévisuelles, et de ses productions cinématographiques douteuses. Son humour grinçant est sa marque de fabrique; il rit de tout, et en particulier de ce qui pourrait choquer les esprits bien pensants dont il se moque: le conflit israélo-palestinien, les religions, les mœurs sociales... Il aime le sexe et l’argent, peut être l’un plus que l’autre, mais il sait que l’un conduit inexorablement à l’autre et que toute tentative de démonstration contraire serait pure hypocrisie. Il aimerait croire en l’Amour véritable, mais son manque de confiance envers la nature humaine qu’il dissocie à peine de celle de l’animal, le pousse à y renoncer, même si cette constatation lui est douloureuse. Malgré cela, il éprouvera des sentiments pour deux femmes qui n’auront en commun qu’une plastique de mannequin sur papier glacé: « Isabelle qui n’aimait pas suffisamment le sexe, et Esther - de vingt ans la cadette de Daniel - qui n’aimait pas suffisamment l’amour ».
Cette notion de sentiment sera incomprise de Daniel 24, puis de Daniel 25, respectivement 24ème et 25ème générations de clones issus du « géniteur » originel, évoluant environ deux millénaires après lui et qui se livrent à une analyse exégétique du « récit de vie » de Daniel 1, afin de saisir rétrospectivement ce qui animait leurs ancêtres.

Cette distanciation opérée au travers du prisme des Daniel 24/25 est l’occasion d’une critique virulente de notre propre société, de notre propre individualité et de la condition humaine toute entière! Partageant le pessimisme de Schopenhauer dont il est l’un des plus fervent admirateur, Houellebecq frappe fort en développant des thèmes déjà présents dans ses précédents romans: le sexe, les relations homme-femme, la connerie humaine (pléonasme!) sous toutes ses manifestations… Il n’est pas inquiet quant à l’avenir de la société et de l’Homme en général, puisque cela impliquerait qu’il y ait une alternative en sa faveur, or cette alternative n’existe pas. L’Homme est sur la voie de son déclin car il comporte en lui-même les germes de sa propre disparition. La notion d’individu est devenue prépondérante; l ‘ego a pris le dessus, au point qu‘on ne se reproduit plus de manière charnelle mais par clonage, ce qui ouvre les portes d’une certaine forme d’immortalité.
L’environnement dans lequel il évolue est dépeint comme féroce.
Les références aux thèses darwiniennes sont d’ailleurs nombreuses dans le récit de Daniel 25 qui décrit les « sauvages », sorte d’humains primitifs, comme des animaux qui éliminent les plus faibles d’entre eux si la nature ne s’en est pas encore chargée. Les individus âgés et fragiles sont écartés dans cet univers déstructuré proche de l’état de nature décrit par Hobbes.

Loin de la littérature « prozac » dont on pourrait trop facilement le rapprocher, « La possibilité d’une île » fascine par son hyper réalisme.
Vénéré ailleurs, sujet à polémique en France où l’on s’attache à fustiger la forme sans prêter attention au fond qui servirait pourtant de substrat à bien des réflexions, Houellebecq dérange et n’en finit pas de faire parler de lui, indirectement ou non dans la mesure où la question du clonage humain reste encore taboue, alors que la science progresse à grands pas (Un laboratoire américain a d’ailleurs « mis au monde » ces jours-ci le premier clone de primate, génétiquement proche de l’Homme…).

Notons que Houellebecq vient d’achever la réalisation de « La possibilité d’une île » pour le cinéma, dont on reparlera sûrement lors de sa sortie en 2008.

Michel Houellebecq, La possibilité d’une île, Fayard, 2005.

11 novembre 2007

Exposition : Steichen, une épopée photographique

S'il fallait un exemple de ce que la photographie peut revêtir en elle-même d'artistique, Steichen remplirait aisément ce rôle. Fort heureusement, aujourd'hui, il n'est plus besoin de se plier aux argumentaires d'hier et aux visions passéistes de l'expression artistique, et bien naturellement, la photographie s'est dotée de thuriféraires sourcilleux. Il n'empêche, l'exposition que consacre le Musée du Jeu de Paume au photographe d'origine luxembourgeoise rappelle, en quelques 400 photographies, au béotien, la force de cet art.

D'emblée, à peine les pieds mis dans l'enfilade de salles qui s'étalent sur deux étages et qui rendent hommage à ce fin stakhanoviste de la photographie, on est saisi par la délicatesse du cliché. Brumeux, doucement vaporeux, une quasi évanescence romantique. Voilà ce qui émane de l'art Steichen. De ce photographe décédé alors qu'il avait presque cent ans, de cet européen pendant les 18 premiers mois de sa vie, puis émigré dans le Wisconsin avec ses parents, pour y être naturalisé américain, c'est certainement ce qui revient à l'esprit.

Des clichés du Balzac de Rodin, exceptionnels par leur mystérieuse atmosphère embrumée, au sombre Flatiron Building, et en passant par le Brooklyn Bridge, objet lui même d'un célèbre argentique, l'art de Steichen s'épanouit au gré des photographies présentées au visiteur. Retouchés, transformés, travaillés comme par un orfèvre, le rendu de ces clichés est magique. A tel point que l'on aurait aimé pouvoir se livrer à une rapide comparaison avec l'original. Et certainement, l'exposition y aurait gagné en qualité à nous mettre plus au fait des techniques usitées. Quoi qu'il en soit, c'est sans doute d'ailleurs cette partie du parcours qui se révèle la plus instructive, tant elle étonne par son résultat.

Mais il nous est également rappelé que Steichen fut un solide portraitiste, traduisant avec une vibrante réalité la nature de ces sujets. Défilent ainsi Pierpont Morgan, Churchill ou encore Brancusi, l'un de ses amis.

Passionné d'horticulture, ce qui vaut d'ailleurs à l'exposition quelques clichés, Steichen fut également photographe de l'armée durant la première guerre mondiale. Mais il retourna rapidement à ses premiers émois et travailla pour de célèbres magazines à l'instar de Vogue et de Vanity Fair. Seront ainsi magnifiquement immortalisés nombre d'acteurs et de célébrités, tel Fred Astaire et Greta Garbo. Et bien sûr, comment, comment ne pas se souvenir de cette exceptionnelle série de clichés représentant Isadora Duncan sur les hauteur de l'Acropole?

C'est donc tout cela Steichen, cet inventaire à la Prévert qui, imparfaitement, rend compte de son oeuvre. Mais c'est aussi bien d'autres choses. Directeur de la photographie au MoMA de New York, organisateur de cette si célèbre exposition, "The family of Man". Et c'est aussi cela. Ces quelques lignes n'y suffisent donc pas. L'exposion du Jeu de Paume s'y attèle avec réussite, au terme d'un parcours particulièrement bien ficelé. Photographe d'un siècle, photographe du siècle, Steichen était un artiste. Une si belle rétrospective lui était due.

Exposition "Steichen, une épopée photographique"
Du 9 octobre au 30 décembre 2007
Musée du Jeu de Paume, 1 place de la Concorde, 75008 PARIS
Mardi 12 h - 21h ; Mercredi à Vendredi 12h - 19h ; Samedi et Dimanche 10h - 19h

5 novembre 2007

Le Guépard


C'est une bien belle traduction que nous a récemment livrée Jean Paul Manganaro. Celle d'un roman exceptionnel, lui-même magistralement immortalisé par Visconti, dans un film éponyme et digne vainqueur de la Palme d'or en 1963. A contempler aujourd'hui l'heureuse fortune de ce récit écrit par Giuseppe Tomasi di Lampedusa, c'est singulièrement amusés que l'on redécouvre que l'écrivain sicilien essuyait les refus récurrents des éditeurs italiens de l'époque, Mondadori en tête. L'affront est aujourd'hui réparé. Le Guépard fut publié en 1957, malheureusement à titre posthume. Consécration d'une oeuvre qui n'en méritait pas moins, c'est aujourd'hui l'un des titres majeurs de la littérature italienne de ce siècle. Un classique.

Sans doute parce qu'il en était lui même issu, Lampedusa retrace avec puissance, au fil des années 1860-1910, le destin d'une famille princière siciliene, les Salinà. Se regroupant autour de son chef, l'imposant, le léonin, le "guépardesque" Don Fabrizio, la famille contemple l'irrésistible processus d'unité italienne initiée en ces temps là par Mazzini et Garibaldi. C'est en effet précisément l'époque du débarquement des troubles garibaldiennes, du remplacement d'une monarchie par une autre, celle des Bourbons renversée par Victor Emmanuel, héraut de l'unité. Entre leur somptueux palais de Palerme et leur résidence labyrinthique de Donnafugata, les Salinà évoluent nonchalamment, au gré des évènements politiques majeurs. Au milieu de cette lente érosion qui les guette, et dont on sent que seule la présence de Don Fabrizio peine à contenir les fondements d'un édifice fragile, une passion naît. Celle de Tancredi, le neveu chéri, celui qui prit les armes pour la cause piémontaise, tranchant ainsi avec le tiède acquiescement du prince, pour la fille de l'opulent maire de Donnafugato. Une union qui semble sceller la compromission des Salinà. C'est que si Angelicà est d'une exceptionnelle beauté, elle n'en est pas moins issue d'un monde différent.

Tomasi di Lampedusa conte ici la lucide chronique d'une aristocratie sicilienne en déroute, d'une noblesse décadente. Décrépie comme les palais qu'elle habite. Aux termes d'une écriture riche et baroque, d'un style élégant, magnifiquement restitué par la toute récente traduction, c'est l'histoire d'une caste qui est relatée. Une caste au contact d'évènement qui vont en précipiter la chute, sous l'oeil froid du Prince et de son confesseur privé, le père Pironne. Et du lustre flamboyant des bals donnés et des convenances et bienséances de ce milieu, le Guépard en est le fidèle témoin. Au-delà, c'est une formidable analyse de la Sicile de cette époque, du comportement insulaire d'un peuple qui porte, aux dires de Salinà, depuis vingt siècles "le poids de magnifiques civilisations étrangères, toutes venues de l'extérieur, déjà complètes et perfectionnées", mais dont aucune n'a pu germer en eux. Plus qu'un roman brillant, miroir d'un passé suranné. Une vraie étude de moeurs.


Giuseppe TOMASI di LAMPEDUSA, Le Guépard, Seuil, coll. "Points", Rééd. 2007, 294 pages, 7,50 €.

2 novembre 2007

César Birotteau


C'est bien là le propre de Balzac. Son oeuvre si exceptionnelle semble inépuisable, et les titres défilent. Toujours, inévitablement, il est un roman que l'on oublie, que l'on découvre. Assurément, César Birotteau est de ceux-là. Et s'il ne bénéficie certainement pas de la notoriété aujourd'hui indiscutée des Père Goriot, Colonel Chabert et autre Peau de Chagrin, en dehors du cercle restreint des juristes, ravis de trouver en son sein d'amples développements littéraires à propos du système des faillites, sans doute ne faut-il pas y voir la marque d'une quelconque infériorité. Loin s'en faut. Et pour cause, César Birotteau compte parmi l'un des chefs d'oeuvres balzacien.

On se prend d'une certaine empathie pour César, ce commerçant si bonhomme de la rue Saint-Honoré. Parfumeur de son état, c'est à la Reine des roses qu'il officie. Sous l'oeil bienveillant de son épouse Constance et de sa fille Césarine, il élabore diverses essences aux noms évocateurs, cédant à l'orientalisme ambiant, à l'instar de cette Pâte des Sultanes qui contribua a asseoir son aisance financière. Mais l'heureux parfumeur vient de recevoir la légion d'honneur, certainement, se plaît il à répéter, en raison du fait qu'il siégeait au tribunal consulaire et combattait pour les Bourbons sur les marches de Saint Roch, au 13 vendémiaire, où il fut blessé par Napoléon. Grisé par cet honneur, auréolé du prestige qu'il retirait de sa récente nomination ès qualité d'adjoint au maire du IIe arrondissement de Paris, César en veut plus. Et c'est ainsi qu'il s'embourbe dans une sombre affaire de spéculation foncière afférente à des terrains sis aux alentours de la Madeleine. La difficulté provient du fait que le parfumeur, sûr de sa bonne fortune, y mit l'essentiel de ses économies, et qu'en coulisses, oeuvrait sournoisement Du Tillet, un ancien commis de Birotteau devenu banquier véreux. Et celui-ci voue une haine féroce à son patron de l'époque, concrétisant ainsi son ressentiment au travers d'une manipulation. C'est la chute du commerçant qu'il veut. Rien de moins. Et naturellement, dans ce piège infâme, César s'y jettera à bras ouverts. Aux heures de gloire suivent les temps de malheur, tragiquement couronnés par une faillite retentissante. Grandeur et décadence. Mais bien sûr, c'est sans compter la soif inébranlable d'honneur du parfumeur. Et son entourage, particulièrement aidant.

Classiquement modelé sur le moule balzacien, celui de l'étude quasi entomologique d'un microcosme déterminé, César Birotteau nous révèle avec brio le monde des commerçants parisiens de la Restauration. C'est là l'occasion d'un portrait acerbe de cette classe de la population, une immersion fort réaliste. Balzac est toujours riche d'enseignements et César Birotteau ne faillit pas à cette règle. Que dire de ce magistral exposé des dernières pages consacré à la législation française de l'époque sur les faillites? Que dire de ces éclairantes réflexions sur la justice consulaire, si ce n'est qu'elles sont d'une criante actualité? Et pourtant, au delà de ces aspects scientifiques, il s'agit bien d'un roman, un vrai, où les tribulations de l'infortuné parfumeur passionnent. Doté d'un optimisme remarquable, César Birotteau mérite certainement plus qu'une simple révérence juridique. A n'en pas douter, une oeuvre majeure du corpus balzacien.


Honoré de BALZAC, César Birotteau, Gallimard, coll. "Folio Classique", rééd. 2005, 401 pages, 6,60 €

31 octobre 2007

Exposition Courbet


Première rétrospective de l'oeuvre de Courbet depuis 1977, l'exposition proposée par la Réunion des musées nationaux (Rmn) et le Musée d'Orsay présente 120 peintures, une trentaine d'oeuvres graphiques et environ 60 photographies sur un parcours de 1500 m².

Le propos de cette exposition est de mettre en avant la modernité de Courbet, de l'élever au rang de maître aux côtés de Cézanne ou Manet.

Pour cela, les commissaires de l'exposition ont choisi de rythmer le parcours des visiteurs en huit temps, qui représentent autant de thématiques dans l'oeuvre de Courbet.

Révélé au Salon de 1844 par l'Autoportrait au chien noir, Courbet nous saisit surtout avec son Désespéré, toile de 1843-1845 dont il ne s'est jamais séparé. L'artiste, pourtant réputé pour sa jovialité, témoigne ici de son spleen, dans une représentation torturée, nouée. Le sujet semble à chaque instant vouloir jaillir de son cadre.
C'est assurément une des toiles les plus fortes de la rétrospective.

Le deuxième temps du parcours est centré sur la famille de Courbet, sur ses soeurs en particuliers, qui figurent dans de nombreux tableaux. Attachée à sa terre natale, Courbet gardera toujours en lui les paysages de son enfance, comme en témoigne les grottes de la Loue rassemblées plus loin.

Viennent les manifestes. Deux toiles majeures sont présentées ici: l'Enterrement à Ornans et l'Atelier du peintre. Ce sont les dimensions qui impressionnent au premier regard. Puis le sujet lui-même du tableau se met en place. Dans le premier cas, il s'agit de la béance creusée dans la terre, et dans le second, d'un peintre qui tourne le dos aux canons de son époque. Deux toiles qui ont été largement discutées, critiquées à leur époque et qui font l'objet des plus belles louanges aujourd'hui tant leur influence a été déterminante.

Après avoir cédé un temps aux exigences de ses contemporains (portraits de Proudhon, notamment), Courbet choisit de travailler sur le nu féminin. On pense alors immédiatement à l'Origine du Monde, autour de laquelle sont rassemblées les Baigneuses et la Femme au Perroquet, notamment.

Enfin, les scènes de chasse précèdent les dernières toiles de l'artiste. On se souvient de l'engagement de Courbet sous la Commune, de sa condamnation à réparer les frais de reconstruction de la Colonne Vendôme. Les natures mortes peintes pendant l'incarcération à Sainte-Pélagie témoignent de l'état d'esprit du peintre.


Au final, c'est un très beau moment qui est proposé. Un peintre que l'on redécouvre et que l'on a envie de mieux connaître.


Exposition Courbet, du 13 octobre au 28 janvier 2008. Tous les jours sauf les mardis
Galeries nationales du Grand Palais, 75008 Paris, entrée Clemenceau.
Tous les jours 10h-22h sauf le jeudi jusqu'à 20h.
Tarifs: 10€ / 8€
Pour plus de renseignements : http://www.rmn.fr/gustavecourbet/index.html

28 octobre 2007

Triangle

Octobre 2007. L'actualité internationale est marquée par le nucléaire iranien. C'est le moment qu'involontairement je choisis pour lire Triangle de Ken Follett.

1968. Un espion du Mossad, Nathaniel Dickstein, est chargé de pourvoir Israël de la bombe nucléaire. En effet, les services secrets israéliens viennent de découvrir que l'Egypte est sur le point de posséder la bombe atomique, et il semble que la sécurité de l'Etat d'Israël ne pourra pas être assurée sans la possession de la bombe.

Mais ce sont des événements bien antérieurs qui vont conditionner l'exécution de ce plan. Des événements que le prologue situe pendant la Seconde Guerre mondiale et en 1947. C'est l'époque des grands idéalismes. Celle où un monde nouveau est à construire ; et à se partager.


Le reste, c'est un roman d'espionnage, une "aventure tout à fait digne de James Bond", nous dit Ken Follett en post-scriptum. Un Ken Follet pas mauvais, bien documenté. Mais pas forcément très rythmé. On avance, on veut connaître la fin, mais on se dit aussi que la fin, on la connaît. Bien sûr que le plan de Dickstein va aboutir. Bien sûr que la fille est fiable. Bien sûr que les méchants vont perdre (la partie, et la vie).
Quelques facilités aussi. On ne peut s'empêcher de sourire en entendant Al Cortone, un ancien ami que Dickstein sollicite, le "don", raconter sa vie. Au loin, la douce mélodie du Parrain de Coppola déroule ses violons ...
Triangle, c'est l'Occident qui décrit le système communiste, c'est le récit des fedayin qui justifient leur lutte, et c'est Israël qui veut assurer sa position dans une région en proie aux luttes d'influence de la Guerre Froide.

Retour en 2007. Les arguments avancés par le chef des renseignements israéliens sonnent comme un écho à ce que l'on entend en ce moment. Ou plutôt comme un "contre-écho"...

Ça se lit. Mais pas urgemment.


Ken Follett, Triangle, Livre de Poche, 1991, 475 pages, 6 €